dimanche 27 juillet 2008

L'histoire de ma dépendance

Ma mie,

Tu es douée pour écrire l’absurde et décrire le cauchemardesque. Je t’en félicite et, demeurant, reste bouche bée devant tant de talent. J’aurais tout de même souhaité retrouver des mots plus joyeux et des rimes à danser.

Dans cette descente vers l’abime
Les précipices hurlent mon nom et le tien
A mon cœur défendant, les souvenirs, j’abime
Les cris j’étouffe et m’envole aérien
Vers ces couleurs pourpres des cieux
Enluminés à la seule lueur de tes yeux

Cette histoire avec Adam m’intrigue. Je t’avais connu ce penchant naturel pour le difficile, l’inaccessible parfois, mais rarement pour l’impossible. Je verse dans la dramatisation certes, mais j’ai peur de te voir souffrir pour une vétille. Te lamenter vainement n’a jamais été ta tasse de thé, et un amour sans joie, sans le moindre petit espoir de le tenir, ne serait-ce qu’un petit moment, dans ta petite main fine est une annihilation préméditée.

Je reprends alors mes encouragements, annoncés à la va-vite, de puiser dans les sources du désir et de l’amour incendiaire pour faire se consumer cette passion…et te conjure de partir…

Partir loin des rives sur lesquelles échouent ton cœur malmené et tes larmes à venir !

Envole toi vers d’autres cieux, ceux qui pourraient procurer paix et peut être un espoir de bonheur incertain à cette petite fille en toi, Oh combien fragile et délicate.

Envole toi loin, car nulle félicité dans le défit du destin…

Vois-tu chère amie, le destin est ingrat, malicieux et vénéneux. Il est à apprivoiser, à accepter surtout avec l’humilité qu’on lui doit pour ne point subir ses impulsions vengeresses. Je le dis car j’en avais payé les redevances.

Je voulais de tout abord te raconter ma joie nouvelle, ces deux dernières semaines de bonheur incommensurable, mais l’ennui et l’absence, et toutes ces confidences que tu viens de partager, m’ôtent toute envie d’exhiber un bonheur encore frais, embryonnaire et tellement fragile. Un bonheur qu’il faudrait désormais nourrir chaque jour avec une injection d’espoir et beaucoup de foi…

Je te raconte donc comme promis, l’histoire de mon divorce. Puissent les mots délester et mes maux et les tiens.

Ça fait un an que cette histoire est terminée. Aujourd’hui la douleur s’est estompée, elle s’est vue dérober cet espace énorme qu’elle occupait dans mon cœur et mes souvenirs par des joies nouvelles, l’envie de danser au bon matin, la paix dans un cœur qui jadis gisait sous le poids des frustrations, un brin de doutes qui font que l’espoir en demain est saisissant, revivifiant…incommensurable !

J’avais rencontré mon ex-mari par un aléa du hasard pour le moins dire surprenant. Je venais de rompre des fiançailles avec un homme que je croyais aimer d’un amour pur et lyrique, mais au fait je m’étais rendue compte très rapidement que tout ce que j’aimais en lui n’étaient autres que ses poèmes.

N’est ce pas toi qui disait toujours que je m’entichais des bad boys et autres artistes inachevés ? Cesses donc ce sourire moqueur que je ne t’expédie un poison dans ma prochaine lettre…

Je reviens à mon histoire…

Le destin a voulu que nous nous rencontrions dans une période où je me sentais faible, désarmée, en quête de tendresse et d’affection. Il m’en donna…à satiété.

Et comme l’enchantement ne vient jamais seul, comme la pluit se suit de beau temps et le beau temps souvent de nuages, la grâce disparut au bout de quelques semaines de tendre complicité, de ravageuses émotions, d’une passion au goût de démesure. Elle disparu pour ne jamais réapparaitre, pour que ne subsistent que malentendus, séparations, folies, drames et retrouvailles stériles.

Un an et demi à souffrir le manque d’amour et son défunt souvenir. Une éternité dans une durée tellement courte à pleurer ce qui fut, à regretter mes folies de femme amoureuse et le trop plein d’amour qui m’emprisonnait et faisait fi de toute raison.

Que de cris étouffés, des larmes amères et une peur démente de perdre ce que j’avais déjà perdu. Le don de moi, l’offrande qu’étaient mon âme et mon quotidien morbide et décousu.

Le don de soi…Quelle bêtise !

Si aujourd’hui je devais regretter une seule chose dans ma vie, ce serait bien cette promesse de me donner corps et âme. Pire…ce serait le fait de l’avoir honorée!

Ce n’est point que l’amour est une mauvaise chose en soi chère amie, n’en doute surtout pas ! Au contraire…j’y crois toujours, plus que jamais. Je crois à sa force, à sa magie, au fait qu’il a cette miraculeuse capacité de nous rendre forts aux moments de nos plus saisissantes faiblesses.

Mais l’amour est une chose, la dépendance est toute autre.

Ce que te raconte là n’est point l’histoire d’un amour déchu…Non, l’histoire que j’étale ici, pour y déverser encore une fois le peu de regrets qui me pèsent sur le cœur et qui embrouillent mon esprit, pourtant clair, aux soirs de peines lunes, est belle et bien l’histoire de la dépendance, celle qui m’a dépourvue de paix et de félicité, celle qui a assombrie deux ans de ma vie que j’espère longue, prospère et pleine d’amour…

Si je noirci ces lignes de lettres flottantes, de mots dérobés aux souvenirs et aux futures espoirs, c’est pour te confier, à toi seule ma tendre et si chère amie, l’histoire de ma dépendance telle que je l’ai vécue, telle que je m’en souviens aujourd’hui, sans porter de jugements, ni dénigrer l’injustice qui fut et celle qui pourrait un jour croiser mon chemin.

Ah…et puis quel ennui !

Tu auras la suite quand le cœur y serait. Car là, un appel me vient de loin, de l’autre côté de l’océan pour me rappeler que mon cœur virevolte, léger et aérien, autour d’une brise chargée d’air revigorant…

Ma chérie, je t’embrasse très fort et vais me délecter à son odeur laissée sur mon oreiller…

Houyam

jeudi 24 juillet 2008

cette nuit...

Ma chère amie,

Je me suis réveillée cette nuit en pleurant… je ne me souvenais plus de ce contenu cauchemardesque qui m’avait piqué les yeux, et certainement plus le cœur pour faire couler mes larmes, mais j’ai eu une soudaine envie d’écrire ! et j’ai écrit :

Dans la marche douce pour la fin,
on ne se soucie point de l’altitude, on ne craint pas le précipice…
tant que se dresse la voie devant, on avance seul et décidé
Pourtant à la croisée des chemins,
l’on est incapable de choisir sans ce cher allié complice
qui tend la main pour nous guider


Je me suis sentie bien tout de suite et je me suis rendormie.

Je suis heureuse de te retrouver Houyam et bien que la présence physique aurait été plus réelle et les regards plus éloquents, il y a des vérités qui ne se transmettent qu’en mots et des mots qui ne se disent pas… je te les écris donc en lettres, puissent-elles être fidèles à mes messages…

Tu m’as demandée si Adam était beau… Je sais que tu pensais aux beaux petits cœurs dont je m’entichais dans le temps ! Dieu que ça me fait rire de penser à Jamal ! Tu t’en souviens ? Notre voisin blond au teint halé par le soleil de ses longues journées de chômage, ce pauvre mur auquel il s’adossait doit toujours porter l’empreinte de sa chaussure et de son ennui ! Ma mère m’avait sermonnée à la vue de mon bulletin cette année là ! Elle m’avait brandillé une page de notre cahier de souvenirs commun où j’écrivais mon amour adolescent dans les mots bien sots d’antan ! Ce ne fût pas mon jour certes mais ce n’est pas pour autant que je me suis gardée de récidiver ! J’avais écrit quelque chose comme :

Le soleil se lève plusieurs fois le même jour, quand je l’aperçois, quand il sourit, quand il parle… le reste est nuit…

Ma mère m’avait crié : dorénavant il fera noir de jour comme de nuit alors !
Elle avait gardé cette page et avait cherché secrètement ce bel ange sans se douter que c’est Jamal qui lui faisait les courses ! Elle l’aurait accusé de je ne sais quel monstruosité telle qu’on la connaît !

Ta mère à toi était plus compréhensive de tes amourettes … peut être que tu ne lui laissais guère le choix rebelle comme tu étais, sans parler des déclarations de Khalil le fou qui noircissaient tout le quartier ! Maman avait une sainte trouille de me voir traîner avec toi ! elle craignait me laisser éconduire par tes mœurs légères… elle ne pouvait pas imaginer, avant de trouver le cahier de souvenirs, que je t’écrivais des fois des lettres en réponse à ce fou de Khalil quand tu n’étais pas d’humeur à jouer ton allumeuse… je m’en sortais plutôt bien !! (fou rire !)

Non… Adam n’est pas du tout beau… je le dis non sans satisfaction : je ne suis plus l’écervelée esthète de Jadis… Adam n’est pas beau, il est pire ! Il est si homme et si humain qu’on en oublie de bien lui saisir les traits… rien en lui n’aguiche et pourtant il éprend…
Je crois que le destin m’a fait rencontrer Majd pour connaître l’amour… Majd est un gars parfait, il en ferait rêver plus d’une… c’est pourtant à ses côtés que j’ai perdu mes songes… et que j’ai embrassé l’amour d’Adam en toute lucidité…

Tu me parles de tes milles échecs et je te dis que je ne suis pas plus heureuse en amour… Adam est non seulement l’oncle de mon fiancé mais également un papa gâteau comme je les aime et un mari fidèle…
Il n’est donc pas question de m’embraser si l’incendie risque plus de détruire que de consumer… je ne suis pas cette pyromane n’est ce pas mon amie ?
Je me confine donc à un amour impossible que je tente d’avorter et je veux que tu accompagnes ma convalescence…

Ton mariage je ne voulais pas t’en parler tout de suite, en tout cas pas avant que tu en ais envie… par contre ce nouveau que tu me ramènes légèrement en discussion ne passera pas comme ça ! Il y a mon détecteur de bijoux qui me dis que t’es tombée sur une perle et tu ne t’en tireras pas comme ça ! et quitte à me raconter de divorce je veux les détails !

Houyam, pas un instant ne passe, en dégustant une glace à la vanille, sans que je n’aie une pensée pour toi…


Bien à toi


Farah

lundi 14 juillet 2008

Je te raconterais...

Chère amie,

Tes mots me touchent et me transpercent le cœur et ton amitié me manque au même degré qu’à toi. Ton absence était une présence pesante qui ravivait la joie puérile de nos années d’enfance et nos tumultueuses aventures d’adolescentes. Ta présence aujourd’hui à travers ces lettres douces amères me renvoie encore une fois vers mon image désuète que tant de fois j’ai tenté d’estomper.

Détrompe toi ma belle, je ne ricane nullement de tes histoires de cœur, quoique farfelues et un brin vicieuses. Je te trouve, te retrouve, te redécouvre la Farah des jours lointains. Amoureuse éternelle…de l’amour !

Tu dis aimer l’oncle de ton pauvre homme de paille ? Soit ! Brule les pailles, incendie le cœur de ton objet de désir et mets sens dessus-dessous la vie de qui voudrait ternir la tienne. Apprend à être toi-même. L’essence de ton être maladroit et espiègle vaudrait mieux que l’ersatz de cette autre toi portant le masque des convenances.

Voilà pour les conseils…si tant est ce que tu cherchais en m’écrivant. Et je sais pertinemment que ce n’est nullement l’avis d’une femme aux milles échecs et tant d’amours perdus que tu espérais. Tu le disais d’ailleurs, tu me parle comme à toi-même et je te réponds comme tu te serais répondu…en cherchant dans les profondeurs les réponses les plus désagréables.

Finalement, oui je ris, ou plutôt je souris avec tendresse au souvenir de cette jeune fille romantique qui pouvait perdre la tête pour un baiser au clair de lune. Dis, est-il beau au moins ton amour ? As-t-il l’âge et la ténacité pour assouvir tes folles désirs ?

Je connais la réponse. Je la vois dans tes yeux pétillants et ton sourire narquois en te disant «ah si elle savait… ». Je suis heureuse pour toi et un peu inquiète tout de même. En brulant les pailles fais bien attention à tes ailes !

Tu m’as rappelé aux bons souvenirs de Rabie, Jad et tous les autres. Te souvient-il de Khalil ? L’artiste déchu qui chaque soir se suicidait en succombant au chagrin et chaque lendemain noircissait les mus du lycée avec des messages codés en ode à l’amour, au mien propre, à l’espoir de me voir un jour sienne. Un souvenir qui me fait monter les larmes aux yeux…des larmes de fou rire !

Farah, je t’en veux !

Qu’as-tu à me parler encore de cet ex- mari dont l’évocation même souille ces tendres moments de complicité avec ma meilleure amie retrouvée ?

Tu as eu peur ? Tu crains d’avoir ravivé les cauchemars et les nuits sombres où, naviguant dans les flots des larmes, je frôlais les bords de l’abîme ? Respire un bon coup…j’aime à t’effrayer.

Il n’en est rien. Le souvenir est dans les oubliettes. Je l’ai ravivé mille fois, l’ai accepté comme le châtiment d’un hasard envers lequel je me refusais d’être humble et reconnaissante, et l’ai ensuite remis à cette partie profonde de mon être qui recueille le mal et l’apprivoise pour que, dans mon cœur, ne puisse subsister une once de rancune.

Je voulais te la raconter cette histoire, dans quelques années peut être, en la ressuscitant des méandres de l’oublie pour en faire un roman à l’eau de rose ou un pathétique navet. Mais te revoilà encore, toujours la même, impatiente, bouleversant le cours de la vie et les desseins des hommes. Tu cherche à connaitre le fin mot de l’histoire ? Les détails que n’ont pu te conter les tentes et les mégères du quartier ?

Je te la raconte alors cette histoire. Mais je t’avertis, ce n’est nullement une histoire d’amour…ce fut simplement l’histoire de ma dépendance…

Quoique…comme dirait l’autre…ça sera pour la prochaine lettre. Puisse le suspens mortifier les âmes des indiscrètes et autres Farah bouillantes d’impatience.

Encore une chose. Je suis d’humeur à l’humour car je viens de rencontrer l’homme qui fût pendant cette dernière année mon soutien, mon ami et mon confident qui se riait de ma souffrance simulée après ce divorce pour le moins tumultueux. Je l’ai rencontré pour la première fois après tant de lettres échangées, tant de rires et de larmes étouffées, tant d’attente pour retrouver les bras de celui que j’ai cru être mon tendre ami. Et devines quoi ? Mon cœur virevolte autour du feu…encore une fois…mais avec tant de joie.

Bien sûr que je te raconterais!

Farah, il se fait que des fois, tout comme à cet instant même, j’ai juste envie de te disputer une glace à la vanille en écoutant ton joli rire sonore…

Houyam